Léon Ouaknine, notre ami français du Canada, vient de publier aux Editions Grenier à Montréal : » Il n’y a jamais eu d’abonné au N° que vous avez appelé! Conversations entre un père et sa fille » (285 pages, 19 dollars canadiens), un ouvrage que nombre de bien-pensants classeront dans les ouvrages iconoclastes ! Et ils auront bien raison, pour une fois !
Mais le livre de Léon va beaucoup plus loin que le pamphlet anti-clérical ou anti-Dieu , il est l’œuvre d’une pensée lucide au travail qui tente de démonter les effets malsains des croyances et des establishments religieux. Léon s’attaque aux croyances établies et aux idées reçues par les hommes d’un dieu qu’il soit chrétien, judaïque ou musulman.
Je ne dirai pas que Léon est athée car ce serait l’affubler d’une croyance, celle de l’inexistence de dieu (au passage, remarquez que je ne mets pas de majuscules au mot « dieu » ; non pas que je sois sous influence car Léon continue lui d’en mettre une- ce qui me semble un reliquat de respect même à l’inexistant- mais parce que je décide dans cet article de le prendre comme un objet et non comme un sujet).
Laïc : c’est le mot qui pourrait le mieux s’approcher de Léon à condition qu’on lui colle l’adjectif « raisonnable ». Léon est un laïc « plein d’usage et raison » qui est revenu … au Québec « pour vivre entre ses parents le reste de son âge » (du Bellay).
Voilà pour l’auteur. Quant à Stéphanie, sa fille, plutôt qu’un faire-valoir des idées de Léon, elle lui apporte par ses questions une réplique intelligente sans naïveté feinte.
Cet ouvrage est une vraie et belle thèse c’est-à-dire que Léon démontre pourquoi l’individu et le groupe ont eu besoin de religion « l’un des plus forts agents que l’humanité ait jamais inventé pour unir, solidifier et préserver les caractères spécifiques des groupements d’homo sapiens depuis ses débuts en petites bandes familiales jusqu’à la tribu et la nation » (p.79) . Léon analyse, avec sa fille, les preuves de l’inexistence de dieu et surtout en montre toutes les conséquences politiques, éthiques et civilisationnelles.
Pour reprendre une phrase célèbre à propos de la liberté : religion, que de crimes commis en ton nom ! De l’inquisition au jihad islamique en passant par les dragonnades qui poussèrent à l’immigration mes ancêtres (oui les miens) vers Saint Hélier et Londres !
« Quoi de commun entre les attentats contre des cliniques d’avortement aux Etats-Unis et le jihad islamique en Algérie ? Quoi de commun, si ce n’est le refus de la liberté de l’autre au noms de valeurs sacrées, révélées en d’autres temps et d’autres lieux, par les messagers de Dieu ! » (p.13)
A Stéphanie qui s’étonne : « les religions n’ont pas les mains nettes. Pourquoi malgré tout jouissent –elles d’une telle impunité ? » Léon répond « Pour deux raisons : d’abord parce que la religion agit comme une force de cohésion ethnocentrique de son troupeau…[…] cette impunité tient à sa fonction d’intermédiaire pour l’obtention de l’absolution divine des actes mauvais. […] comment oser , dans ces conditions, interpeller la religion, intercesseur auprès du ciel , pour exiger qu’elle rende des comptes ; peu de gens s’y risquent. » (pp.80,81).
Il faut aussi dire, mon cher Léon, que l’histoire proche nous montre qu’en religion comme en politique, les pervers, les fanatiques sont ceux qui sont le plus facilement crus au détriment des gens de bon sens, ceux qui ne font pas de bruit. Les croyants, manipulés et soutenus par leurs prêtres extrêmists, se livrent alors aux pires excès. Je suis aussi déçu que Cabu par l’attitude on ne peut plus tiède des religieux qui savent faire la part des choses, et il y en a beaucoup.
» Je suis frappé de voir, en ce qui concerne les musulmans, à quel point les modérés ne s’expriment pas et laissent faire des choses terribles en leur nom. » Cabu, dessinateur.
Léon Ouaknine est donc un homme de raison et de savoir. Il écrit « qu’il ne se cache pas d’un parti pris délibéré pour la raison sur la foi, pour la connaissance sur la croyance, pour l’éthique réfléchie sur les catéchismes en tous genres. Ce choix n’est pas arbitraire. L’usage de la raison offre une prise argumentée du réel, ce que ne font pas les religions, réduites à la foi, aux incantations et aux prières. »
Dans un monde idéal fait de respect mutuel et de bonne entente entre les terriens, le fait de croire au sacré ne devrait pas altérer le jugement au point de commettre des crimes contre la liberté. Utopie de ma part ?
Dans sa conclusion, Léon va plus loin en opposant Dieu et la Raison (mettons des majuscules!) et il nous dit clairement que l’esprit humain traîne la religion comme un boulet depuis des temps immémoriaux et que cela va aujourd’hui encore l’empêcher de relever de nouveaux défis. Ainsi, s’affranchir de la religion devrait être faire partie le viatique pour le futur, pour un autre Etre humain.
Ton livre m’a breaucoup fait réfléchir … moi qui mets mon espoir en l’homme et qui pense que Dieu existe et qu’il est en nous… Le reste n’est qu’histoires de prêtres de toute confession et cela ne m’intéresse pas plus que les arguments pour ou contre les minarets à côté du château Frontenac, de la cathédrale de Bâle, du Musée du Louvre ou de la chapelle des Baux de Provence…A te lire, Léon..
Guy Lesoeurs
Lancement du livre au Québec suivre…